« Aujourd’hui, la région MENA est pratiquement absente de la « Route des épices » moderne… » Partant de ce constat établi dans une étude menée par PayPal et le cabinet Nielson intitulée « Modern Spice Routes – The Cultural Impact and Economic Opportunity of Cross-Border Shopping« , un projet inédit vient de voir le jour en Tunisie et se prolongera au Maroc et en Jordanie, à l’initiative de la Banque Mondiale (Bailleur de fonds), du Centre du Commerce International (Partenaire technique) et du Gouvernement tunisien représenté par le Ministère du Commerce et de l’Artisanat.
Tel est donc le cadre dans lequel le « Projet de Développement des Exportations des PME à travers les Places de Marché Virtuelles » (Virtual MarketPlaces – #VMP) a vu le jour, dont l’objectif annoncé est de renforcer les capacités des PME exportatrices à se développer à l’international via ces fameuses places de marchés électroniques (e-Marketplaces), devenues un must et un one stop shop pour le développement des exportations, et de soutenir les réformes institutionnelles afin de créer un environnement favorable pour le développement du commerce électronique en Jordanie, au Maroc et en Tunisie.
Or historiquement parlant, la Tunisie était autrefois LA Marketplace de référence de par sa position géographique privilégiée. Et les vestiges du port punique de Carthage ou du comptoir phénicien puis romain de Mahdia sont témoins de cette tradition ancestrale pour le commerce avec l’extérieur.
Transformation digitale des exportations
Certes, le commerce international a changé de manière radicale au cours de l’histoire humaine, depuis le recours à la « peau de bœuf » comme moyen de transactions commerciales de l’ère punique au « Bitcoin » des temps modernes adopté aujourd’hui comme mode de paiement des échanges commerciaux.
Cette transformation digitale du commerce international a fait émerger de nouveaux acteurs incontournables à l’image des places de marchés électroniques (VMPs) qui constituent aujourd’hui un pilier important du commerce mondial.
Aujourd’hui, lorsqu’on parle de VMP (Virtual Market-Place), un nom revient souvent à l’esprit, celui d’Alibaba.com, la place de marché chinoise lancée en 1999 qui battu tous les records possibles et imaginables faisant au passage de Jack Ma, son patron, l’homme le plus riche de Chine : i) la plus grosse introduction en bourse de l’histoire au New York Stock Exchange lui permettant de lever en septembre dernier près de 25 milliards de dollars, ii) le plus grand chiffre d’affaires jamais réalisé en une journée de vente en ligne le 11 de ce mois à l’occasion de la fête des célibataires en amassant la « modique » somme de 9 milliards de dollars.
Coaching de Conseillers #VMP
Revenons à notre projet, pour signaler que trois secteurs prioritaires ont été identifiés à savoir l’artisanat, l’alimentaire et le secteur des services IT. L’objectif annoncé étant d’inscrire 200 entreprises tunisiennes exportatrices sur au moins 3 places de marché virtuelles et de permettre à au moins 50% de ces PME sélectionnées de réaliser au moins une vente via ces plateformes web.
Comme mentionné dans mon récent billet sur la décision impopulaire de la Poste tunisienne de revoir ses prix de livraison de colis à l’étranger, la première étape de ce programme a été assurée durant la semaine écoulée, à destination des « Conseillers #VMP« , censés accompagner les entreprises sélectionnées dans ce programme.
Deux groupes formés d’une vingtaine d’experts chacun entre Consultants IT et Conseillers à l’Exportation ont pu bénéficier d’un cycle de formation intensive de deux journées et demi, couronnée par un examen écrit, pour retenir une short-liste de 20 conseillers VMP prêts à former, coacher et accompagner les 200 PME locales retenues dans ce programme pour faire leur marques sur les places de marchés électroniques les plus actives : Alibaba, Tradekey, eBay, Amazon, Freelancer, Etsy pour ne citer que ces plateformes e-business.
L’on a eu ainsi droit à un atelier de formation riche en contenu et très constructif animé par un expert du CCI, M. Mohamed Es Fih, très à l’aise avec ces plateformes e-business/e-commerce cités plus haut. Avec comme cerise sur le gâteau, le témoignage éloquent d’un entrepreneur web « atypique » ayant bâti son business model sur la vente en ligne de produits d’artisanat sur au moins 3 de ces places de marchés que je viens de citer : M. Bouhlel.
L’histoire vraie de Monsieur Bouhlel
C’est ce Monsieur qui nous a révélé l’histoire d’augmentation abusive des prix de livraison de la Poste, et qui nous a aussi décrit son expérience vécue, et de l’accueil « froid et nonchalant » (à prendre au second degré) qui lui est réservé lorsqu’il se pointe à son bureau de Poste quelque part au Sahel apportant ses colis « d’épices » (je veux dire de produits d’artisanat) commandés sur Amazon, eBay, à livrer quelque part dans le monde…
Il manquait que de lui fournir le tampon-encreur de la Poste pour qu’il fasse lui-même l’affranchissement des colis à livrer, tellement les agents postiers étaient gênés de sa visite quasi-quotidienne, synonyme de boulot additionnel !!!
Bref, cela pose autant de questions sur l’organisation et la logistique ad hoc lorsqu’on fait le choix institutionnel de miser sur le commerce électronique comme levier de développement des exportations… Mais là, c’est une autre question que le PNS Tunisie Digitale 2018 devra résoudre sérieusement si l’on veut miser sur la carte e-commerce en Tunisie.
Voilà ! reste maintenant à finaliser l’inscription des PME candidates à ce projet. Rappelons au passage que l’appel à candidature des PME exportatrices, ouvert depuis mai 2014, n’a pas rencontré un vif succès, amenant les autorités à prolonger les délais de candidature au 15 novembre courant pour n’en sélectionner que 200 entreprises au final!!!
Ceci en dit long sur l’état d’esprit du secteur privé lui aussi en quête d’une véritable transformation digitale, pour sauter sur ce type d’opportunités à saisir, plutôt que d’adopter ce profil bas, indigne des héritiers de Didon ou de Hanon…
En tout état de cause, grâce à cette opportunité, les neveux de Didon et de Hanon sauront-t-ils ressusciter ce mythe de faire de la Tunisie The (Market)Place to be now ?!
Don’t act ! Affaire à suivre…